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Cinéma

Au poste !

Critique d’un film qui ne fait aucun bruit, et est pourtant un bijou d’humour absurde et de réflexion cachée.

Un homme en slip orange, debout sur une botte de paille, au beau milieu d’un champ. Face à lui, des musiciens assis. Lentement, il lève sa baguette et les dirige. La musique retentit, les sirènes des forces de l’ordre aussi. Ainsi commence ce film, ainsi commence notre initiation à l’absurde. Car, durant une heure trente, il ne faudra pas chercher à comprendre. Nous avons juste à nous laisser porter, sans prise de tête et sans trop de réflexion. La réflexion viendra après.

Un homme, un certain Fugain, campé par le convaincant Grégoire Ludig, se retrouve coincé toute une nuit au poste de police, obligé de subir un interrogatoire pour le moins pénible car il a découvert en bas de chez lui un cadavre. Le fonctionnaire chargé de s’occuper de l’affaire n’est autre que le commissaire Buron, plus que brillant Benoît Poelvoorde, flic solitaire et tenace, bien décidé à en découdre. Commence alors un long huis clos presqu’exclusivement entre les deux hommes où la fatigue et le ras-le-bol mutuels pointent. Mais qui a dit que les huis clos étaient toujours ennuyeux et soporifiques ? Pas Quentin Dupieux, en tout cas.

Le réalisateur réussit ici un tour de force majeur : celui de parsemer de rebondissements accrocheurs et hilarants un film qui, sans lui, aurait eu l’air statique. Rien ne semble laisser au hasard. Les personnages sont peu nombreux et, mis à part Ludig et Poelvoorde, tiennent des rôles secondaires. Qu’importe ! Ce sont eux qui donnent tout son sel à ce film. Du flic incompétent et bête auquel il manque un œil de naissance (merci les effets spéciaux grossiers qui font eux aussi partie de l’absurde !), au collègue d’en bas qui ramène une huître au commissaire, toutes les apparitions sont savoureuses. Ce film signe également le retour de l’immense Benoît Poelvoorde au sommet de son art. Pour ma part, cela faisait longtemps que je ne l’avais pas autant apprécié dans un rôle. Il est ici tout simplement magistral, quelque part entre le mec exubérant qui en fait trop, et le flic taciturne qui n’en fait pas assez.

À la fin du film, au moment de sortir de la salle, j’ai surpris une dame dire à son amie : « J’ai pas compris la fin ». Je pense tout simplement que c’est parce qu’il n’y a rien à comprendre sur le moment, il faut laisser les émotions mijoter et réfléchir ensuite. Réfléchir à ce que ce film nous dit sur les relations, sur la société. Alors, si vous voulez un conseil : sur le moment, contentez-vous de rire !

En espérant que cette chronique vous aura donné envie de voir le film, à bientôt !